Moi qui ai vécu, même de loin, le tsunami de 2011 (plus de 18'000 morts) avec la phobie des vagues qui m'habite, comment ne pas être boulversée par cet ouvrage ? Voir LA vague arriver... aussi dévastatrice...
Une plongée vers l'horreur autant que vers la force du lien familial, la passion d'un métier (mangaka), la résilience. Un monde mystérieux, digne représentant de la culture japonaise. Et un puissant hommage également, à toutes ces victimes.
Sur la forme, le roman saura captiver les lecteurs de mangas puisqu'il est complété de plusieurs planches réalisées par Chie Kutsuwada, adroitement intégrées au fil de l'histoire.
🤞Lauréat au prix Enfantaisie 2024.
📖 Résumé :
En vacances au Japon chez son grand-père, Yūki, 15 ans, cherche à retrouver sa joie de vivre et à calmer ses angoisses. Son grand-père lui parle de son métier de mangaka, lui montre les planches de mangas qu’elle dessinait, enfant, et parvient même à lui redonner le sourire. C’est alors que l’inimaginable se produit : un immense tsunami approche. Il faut absolument partir. Mais alors qu’ils fuient ensemble le danger imminent, le grand-père de Yūki décide soudain de faire demi-tour…
[Éditeur]
Comment reconnaître un bon livre ? Je pas se tromper ? Pour moi, ce sera celui qui nous touche, qui nous questionne. Alors, inévitablement, L'étourbillon entre dans cette catégorie.
Comment ne pas être touchée par cette ado, secrète, "sauvage", qui cherche à affronter un monde, son monde ? Comment ne pas être boulversé par le deuil, le mutisme du père ? Comment ne pas admirer l'autonomie de l'héroïne et sa volonté à s'intégrer ? Car oui, si cette histoire parle de douleurs, de tristesse, de l'insoutenable, à demi-mots parfois, c'est avant tout une question de courage, de résilience et d'espoir ! Mais peut-être faut-il déjà avoir un peu vécu pour apprécier davantage ces non-dits...
Il n’avait pas tellement plu ce jour-là, mais l’air était déjà tellement saturé d’eau que ça donnait l’impression qu’il pleuvait du sol. Et il n’y avait plus rien, l’univers entier avait disparu avec elle. Je me sentais horriblement soulagée par sa mort, je me souviens m’être dit « Voilà, il ne peut plus rien m’arriver » parce que je pensais que rien de pire ne peut arriver dans une vie. Papa et moi ont était à deux, dans le parking derrière l’hôpital et on contemplait ce rien. Etrangement, j’avais l’impression qu’il était soulagé, lui aussi. On ne peut pas passer toute une vie à regarder la vie déserter une personne qu’on aime, à un moment on préfère que ça cesse, on préfère ne plus du tout voir cette personne que de la voir comme ça. Et après, je le sais maintenant, on s’en veut terriblement. Mais, sur le coup, j’avais l’impression qu’on m’avait retiré un poids énorme des épaules pour le remettre quelque part entre mon estomac et mon œsophage, mais il n’était pas encore vraiment déposé. Puis, ce poids deviendrait un vide, encore beaucoup plus lourd. Un vide qui creuserait pendant longtemps. (pp. 78-79)
Un très bon roman pour évoquer le spectre autistique que celui de Elle McNicoll !
Addie a beau paraître semblable à ses camarades en tout point, elle n'en vit pas moins au quotidien différemment. Sa sensibilité est exacerbée. Aussi, lorsqu'elle entend parler d'une chasse aux sorcières qui a eu lieu dans son village se sent-elle étroitement concernée. D'une certaine façon, n'est-elle pas, elle aussi, prise pour cible par une enseignante qui décidément peine à accepter la différence (Ni elle [sa sœur] ni toi n'auraient dû être scolarisées ici, insiste Mme Murphy d'un ton presque désespéré. J'ai trente-trois autres élèves dans ma classe, et toi, tu fais des colères pour un oui ou pour un non. - p. 160) et des camarades intolérants ? Heureusement, sa famille, et sa sœur aînée en particulier, qu'elle admire tant et est elle-aussi neuroatypique, sont là pour la soutenir. Sa démarche : rendre un hommage posthume à toutes ces victimes !
[...] La sonnerie de l'école hurle. Les bruits excessifs me donnent le vertige. Ils me font le même effet que la roulette du dentiste quand elle touche un nerf. Je longe les couloirs en essayant de réguler ma respiration et en regardant droit devant moi. Les élèves parlent très fort entre eux, alors qu'ils sont très près les uns des autres. Ils s'approchent trop de moi, ils se poussent, ils crient. Ça me donne chaud dans la nuque, et mes battements de cœur s'accélèrent. (p. 11)